Violente pluie de poisson à Singapour, en février 1861
Outre-manche, l’un des plus anciens témoignages connus a été adressé à un membre de la Société royale, en l’an 1666. Par ailleurs, on en fait très souvent mention en Allemagne, notamment sous le règne d’Othon III, vers la fin du Xè siècle, où ce phénomène était réputé annoncer des catastrophes, comme la pluie de poissons qui tomba en 990 avait précédé l’invasion de la Saxe par les Vandales.
En France, au courant de l’été 1820, les élèves du séminaire de Nantes "virent avec surprise, à la suite d’un orage pendant lequel ils s’étaient mis à l’abri, la surface de la campagne couverte sur une étendue de quatre cents pas d’une multitude de poissons d’un pouce de longueur environ qui sautillaient dans l’herbe."
Outre-manche toujours, une pluie d’anguilles des sables se serait abattue en 1918 sur un quartier de Sunderland et en 1948, une douche de harengs tomba sur quatre golfeurs près de Bournemouth.
D’autres faits similaires se produisirent outre-Atlantique. En 1819, un hareng de trente-trois centimètres tomba du ciel à Buffalo et en 1879, c’est une véritable averse de harengs qui survint dans un cimetière de Sacramento.
Une pluie de poissons eut encore lieu dans le Kansas en 1899. En 1841, Boston reçut une pluie de poissons, dont un calmar de plus de vingt centimètres! En octobre 1947, la rue se couvrit en quelques instants de milliers de poissons à Marksville, en Louisiane : parmi eux, on identifia "des poissons-lunes, des vairons aux yeux ronds et une perche noire de plus de vingt centimètres de longueur." En 1957, des poissons s’abattirent sur une gare en Alabama.
Les pluies de poissons sont très courantes en Inde et en Australie. Le naturaliste australien Gilbert Whitley a même fait publier en 1972 dans l’Australian Natural History, une liste de cinquante pluies de poissons, dont une pluie de milliers d’épinoches d’eau douce en 1879, de perches naines dans l’Etat de Victoria en 1933, et une pluie de crevettes en Nouvelles Galles du Sud quelques années plus tard.
Certains de ces phénomènes ont pourtant trouvé une explication parfaitement rationnelle. C’est le cas notamment de la pluie de soufre, attestée dès les temps les plus anciens et au Moyen Âge: à la fin du XVIIè siècle, on comprit que la couleur jaune de cette pluie venait de ce qu’elle était chargée du pollen des fleurs de certains arbres, surtout des pins et des sapins. Ce qu’on appelait pluie de laine désignait simplement une ondée chargée du duvet que produisent les graines des peupliers et de certains saules. Les pluies de lait, comme celle qui tomba aux environs de Rome en 234 avant notre ère et celle de 109 qui précéda l’incendie de Rome, "ont été expliquées par l’adjonction de matières crétacées poussées dans les airs par des tourbillons et formant alors avec la pluie une eau laiteuse."
Au XIXè siècle, les spécialistes expliquèrent les prétendues pluies de sang, très impressionnantes, dont la couleur rouge serait due à la terre, à des poussières de minéraux ou d’autres matières balayées par les vents, ou encore à des papillons qui répandaient des gouttes d’un suc rouge.
Des pluies de sang tombèrent ainsi à Lisbonne en 1551 et à Freiberg (Allemagne), trois ans plus tard. A celle-ci s’ajouta également une pluie de chair humaine, qui s’expliqua finalement par une chute de pierres volcaniques ressemblant à de la chair desséchée.
La pluie de "manne" tient, elle, du miracle: En 371, il tomba en Artois, alors que les terres étaient stériles, une pluie très grasse avec une châsse contenant de la laine: "Elle engraissa tellement de terre qu’elle fut appelée manne, à l’exemple de celle dont Dieu nourrit son peuple dans le désert." Cette relique est d’ailleurs conservée à l’église d’Arras où tous les ans une messe célèbre ce prodige.